L’appréciation de la fausse déclaration de risques et son impact sur l’exécution de garantie par l’assureur

L’appréciation de la fausse déclaration de risques et son impact sur l’exécution de garantie par l’assureur

La fausse déclaration qu’elle soit intentionnelle ou non est source d’importants contentieux entre l’assureur et l’assuré. La jurisprudence semble constante sur ce point, les juges du droit estimant le plus souvent que l’appréciation des fausses déclarations se fait par rapport à chaque risque en litige.

Les obligations de l’assuré

Deux dispositions du Code des assurances doivent attirer notre attention sur la question. L’article L.113-2 du Code des assurances qui pose les obligations auxquelles est tenu l’assuré. L’article dispose que l’assuré est ainsi obligé d’honorer ses cotisations « aux époques convenues ». Il s’agit plutôt du souscripteur qui est tenu de payer les cotisations ou les primes pour que l’assuré puisse bénéficier de la couverture. Il est en effet possible que le souscripteur ne soit pas l’assuré en question. On notera également que le souscripteur peut nommer une autre personne qui sera tenue de régler les primes (mandataire). La deuxième obligation de l’assuré est celle « de répondre exactement aux questions posées par l’assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l’assureur l’interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l’assureur les risques qu’il prend en charge ». Cette deuxième obligation est une obligation d’information. Bien que cette disposition ne concerne que l’assuré, l’obligation d’information pèse sur les deux parties au contrat d’assurance notamment lors de la phase précontractuelle et doit se traduire par un échange d’informations entre l’assuré et l’assureur. Il revient à l’assureur de mettre en place un questionnaire adapté lui permettant d’obtenir les informations indispensables à l’appréciation du risque. En ce sens, l’article L.112-3 du Code des assurances dispose que lorsque, avant la conclusion du contrat, l’assureur a posé les questions par écrit à l’assuré, notamment par un formulaire de déclaration du risque ou par tout autre moyen, il ne peut se prévaloir du fait qu’une question exprimée en termes généraux n’a reçu qu’une réponse imprécise.

Les informations fournies à l’assureur doivent lui permettre d’apprécier le risque et établir la tarification adéquate, d’où l’exigence d’honnêteté à l’égard du souscripteur ou de l’assuré. Cette obligation d’information est souvent source de litige entre assureur et assuré et la jurisprudence française est bien riche en la matière (Cass. 2e civ., 17 janvier 2019, N° 15-18.514 ; Cass. 2e civ., 6 juillet. 2023, n° 22-11045) faisant état de différentes situations et mettant en lumière différentes interprétations de l’article L. 113-8 du Code des assurances.   

La nullité du contrat d’assurance pour fausses déclarations ?

L’article L. 113-8 du Code des assurances dispose que « Indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l’article L. 132-26, le contrat d’assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre ».

Cette disposition peut être commentée de la manière suivante : la mauvaise foi de l’assuré entraine la nullité du contrat d’assurance. Ce point est source d’importants contentieux en droit des assurances de personnes. Dans la plupart des cas, l’objet du litige portent sur des informations qui n’auraient pas été communiqués à l’assureur qui refuse en conséquence l’application de la garantie pour fausse déclaration. Tout récemment, la Cour de cassation a été amenée à statuer sur la question en apportant son interprétation de l’article L.113-8 du Code des assurances. En l’espèce, un assuré disposait de plusieurs garanties au titre d’un contrat multirisques. Boucher de profession, l’assuré a omis de communiquer à son assureur une intervention qu’il a subi sur le canal carpien ainsi qu’un problème de phlébite. Si la Cour d’appel a donné raison à l’assureur en estimant que lorsque l’assurance couvre, comme en l’espèce, l’incapacité de travail, les renseignements que l’assureur a besoin de connaître pour apprécier ce risque sont beaucoup plus étendus que pour la seule assurance décès, car les causes d’incapacité de travail sont plus diverses que celles du décès. Il en déduit que les fausses déclarations ont nécessairement diminué l’opinion du risque pour l’assureur, même si ce risque a été sans incidence sur le sinistre, causé par le suicide de l’assuré.

La Cour de cassation décide de casser l’arrêt de la Cour d’appel en estimant qu’en déclarant nul le contrat d’assurance emprunteur pour fausses déclarations intentionnelles de risques, sans rechercher si cette fausse déclaration a été de nature à changer l’objet du risque « décès » ou à en modifier l’opinion pour l’assureur, la cour d’appel a privé sa décision de base légale. Il est reproché à la Cour d’appel ne pas avoir vérifier si l’inexactitude des informations fournis par l’assuré a une incidence sur l’objet du contrat ou sur le risque litigieux à savoir le décès alors que l’article L.113-8 du Code des assurances dispose que le contrat est nul si la fausse déclaration change l’objet du risque.

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Au sens de l’article 1101 du Code Civil, « le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destinées à créer, modifier transmettre ou éteindre des obligations ». Cela signifie que les obligations contractuelles sont volontairement souscrites. A cette volonté doit néanmoins s’ajouter la bonne foi qui oblige l’assuré à fournir à son assureur tous les informations indispensables permettant à ce dernier de s’engager en connaissance de cause. Bonne foi, rien que la bonne foi. Toutefois, les assureurs font souvent face à de fausses déclarations qui influent sur l’appréciation des risques assurables. L’arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de cassation en date du 6 juillet 2023 porte sur un cas de fausses déclarations intentionnelles de l’assuré. Quelles sont les obligations de l’assuré envers l’assureur ? Comment s’apprécie une fausse déclaration ?

La nullité du contrat d’assurance pour fausse déclaration à la lumière de la décision de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation en date du 12 octobre 2023.

L’aléa reste une notion difficilement appréhendable alors même que la doctrine s’est attelée à l’éclaircir. Malgré ce flou qui entoure la notion, celle-ci reste étroitement liée à la nature du contrat d’assurance. Pas d’aléa, pas de contrat d’assurance puisque ce dernier est un accord aléatoire par lequel l’assureur s’engage à garantir le souscripteur en cas de réalisation d’un risque prévu au contrat. L’assuré s’engage à payer une prime mais également à déclarer les informations indispensables à l’appréciation du risque pris en charge par l’assureur. Il en ressort que la bonne foi de l’assuré revêt une place importante dans la validité du contrat. Aussi, une fausse déclaration de sa part peut entrainer la nullité du contrat d’assurance. Cette fausse déclaration doit s’apprécier à la conclusion du contrat d’assurance et non lors de la survenance du sinistre, ce que rappelle l’arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation en date du 12 octobre 2023.

La réticence intentionnelle de l’assuré au regard de la décision de la Cour de cassation

La procédure de nullité pour réticence ou fausse déclaration intentionnelle de l’assuré, régie par l’article L. 113-8 du code des assurances, est complexe. Habituellement, l’assureur doit prouver plusieurs éléments de manière successive : la clarté des questions posées à l’assuré, l’erreur des réponses données par celui-ci, l’intentionnalité de la fausse déclaration initiale ou de la réticence vis-à-vis d’une modification ultérieure, et enfin, l’impact de ces éléments sur l’opinion de l’assureur. La décision de la Cour de cassation semble clarifier la notion de réticence intentionnelle en la distinguant de l’aggravation du risque.